Une aurore boréale à proximité du jardin du Lautaret !
Publié par Jardin du Lautaret, le 7 mars 2023 740
Il était 22h environ, le lundi 27 février 2023, quand une lueur apparait au dessus du sommet de la Grande Chible. Étonnant. Rare en cette contrée. Et pourtant, ce halo rouge violacé est bien une aurore boréale. Elle est capturée par la webcam installée par l'Université Grenoble Alpes, le jardin du Lautaret et Valloire Tourisme sur les crêtes du Galibier. Au même moment, cette lueur est aussi capturée au Collet d'Allevard, confirmant le diagnostic !
Rembobinons ! À quoi sont dues les aurores boréales et pourquoi il est rare d'en voir à ces latitudes ?
Le Soleil, en plus de nous envoyer de la lumière, envoie en continu des particules chargées en électricité. Des protons et des électrons essentiellement. Ce flux de particules appelé « Vent Solaire » est très variable dans le temps. Il peut lors d’éruptions solaires devenir plus intense. Il y a d'avantage de particules et celles-ci se déplacent plus rapidement. Le 25 février dernier, une forte éruption solaire a éjecté un flux important de particules du Soleil vers la Terre.
Ces particules se déplacent à des vitesses entre 300 et 500 km/s parfois à plus de 1 000 km/s lors de fortes éruptions. Elles mettent entre 2 et 3 jours à atteindre la Terre. À leur arrivée, elles « rencontrent » le champ magnétique terrestre et suivent un trajet complexe qui les amènent sur un ovale centré autour des pôles magnétiques de la Terre, légèrement décalés des pôles géographiques. Cet ovale est plus ou moins grand en fonction de l’activité solaire. Il en existe un au Nord et un autre au Sud. L’ovale Nord, le plus observé, passe habituellement au-dessus du Nord de la Scandinavie, de l’Islande, au milieu du Groenland et dans le Nord du Canada. Côté Russie, il est décalé du fait de l’inclinaison du champ magnétique et passe plutôt dans l’océan Arctique. Les 26 et 27 février 2023, le flux de particules est arrivé au niveau de la Terre et nous avons commencé à en observer les effets. L’ovale s’est agrandi et les aurores se sont intensifiées. La frontière Sud de l’ovale Nord est descendue jusqu’aux latitudes de l’Angleterre et jusqu’à la frontière Canada-USA.
Comment a-t-on pu aussi les observer en Bretagne ou même au col du Galibier ?
En fait, elles se produisent à très hautes altitudes, entre 100 km pour la couleur verte et 220 km pour la couleur rouge. Un petit calcul de géométrie permet de montrer que l’aurore vue au Galibier était en réalité au-dessus de Sheffield en Angleterre, à environ 1 000 km de nos montagnes. C’est d’ailleurs pour cette raison qu'on n’a vu que le rouge, émis à plus haute altitude.
Des événements encore plus forts sont possibles. En 1859, une très forte série d’éruption solaire s’est produite et des aurores boréale ont été observées à Cuba et en Inde. Il est important de les étudier car ces particules, en plus de produire de magnifiques lumières, peuvent perturber nos technologies, réseaux électriques, satellites, GNSS (système de positionnement par satellites), communications, etc.
Ce domaine d’étude s’appelle la météorologie de l’espace.
Les aurores boréales sont observables en France, tous les dix ans environ. Les webcams, telles que celle installée par l'Université Grenoble Alpes, le jardin du Lautaret et Valloire Tourisme au Galibier, peuvent devenir de véritables outils d'analyse scientifique dans le domaine de de la météorologie de l'espace.
Webcam du Galibier : www.skaping.com/jardin-du-lautaret/galibier
En savoir + sur la météorologie spatiale :
Article écrit par Mathieu Barthélemy, spécialiste de la météorologie de l'espace et de physique aurorale. Il est professeur à l'Université Grenoble Alpes (IPAG-PhITEM), directeur de la maison pour la science en Alpes Dauphiné et directeur-adjoint recherche du centre spatial universitaire de Grenoble.